Qu’est-ce qu’un gadget ? C’est un “petit objet qui plaît plus par sa nouveauté et son originalité que par son utilité”, nous explique le Trésor de la langue française. C’est un truc, un machin, un bidule, mais c’est aussi un nom de code donné à la première bombe atomique qui a été développée par le projet Manhattan. Le 16 juillet 1945, le “Gadget” a été testé, avec succès, au Nouveau-Mexique. Commence alors la folle aventure de la bombe atomique.
Le 16 juillet 1945, une explosion retentit aux États-Unis dans le désert Jornada del Muerto au Nouveau-Mexique. Une lumière aveuglante irradie les montagnes qui entourent le champ de tir d’Alamogordo. Ce sont les traces de “Gadget”, une arme à fission au plutonium, la première bombe atomique à être utilisée dans le monde.
“L’histoire du nucléaire militaire trouve son origine avec la découverte de la radioactivité à la fin du XIXe siècle, avec Henri Becquerel et par la suite avec les travaux de Pierre et Marie Curie sur le radium et les échanges des scientifiques internationaux, à l’occasion des congrès Solvay dès 1911. Il faut attendre véritablement la fin des années 1930 et la découverte de la réaction en chaîne, qui rend possible l’utilisation de cette radioactivité et de l’atome comme moyen militaire. À partir de là, une course à l’atome se met en place. Les Allemands sont les premiers à se lancer dans cette compétition, avec la mise en place d’un club de l’uranium dès avril 1939, puis les Français, les Britanniques, les Américains, et même les Japonais se lancent dans la compétition en avril 1941”, explique l’historien Jean-Marc Le Page.
“À l’origine, le principe de l’arme nucléaire consiste à disposer d’une capacité de rétorsion si jamais l’Allemagne nazie se dote de l’arme nucléaire. Ensuite, en septembre 1944, la conférence d’Hyde Park marque un changement. Le Japon devient la nouvelle cible car l’Allemagne est en train d’être vaincue”, nous dit à son tour l’historien Dominique Mongin.
Finalisation du projet Manhattan lancé par les États-Unis durant la Seconde Guerre mondiale, l’essai au Nouveau-Mexique nommé Trinity sert à valider les recherches menées sur l’arme atomique. Elle cible quelques jours plus tard les villes d’Hiroshima et Nagasaki au Japon et cause plusieurs dizaines de milliers de morts. Le monde entre dans l’ère nucléaire.
“Dès août 1945, après l’expérience d’Alamogordo et les deux bombes atomiques, tout un courant de réflexion de la communauté scientifique américaine se développe. Le 11 août 1945, Albert Einstein exprime de très gros doutes sur cette arme nucléaire. Selon lui et d’autres grandes figures, cette arme, pour éviter qu’elle dérape, ne doit pas rester concentrée dans les mains d’un seul pays, il faut éviter qu’elle soit entre les mains des militaires et elle nécessite un contrôle international”, explique Jean-Marc Le Page.
Comment la bombe nucléaire est-elle devenue une arme politique ? En quoi cette nouvelle arme a bouleversé la façon de faire la guerre jusqu’à aujourd’hui ? Comment a-t-elle transformé les usages diplomatiques et théorisé la stratégie de la dissuasion militaire ?
Jean-Marc Le Page est historien, professeur agrégé et chercheur associé au laboratoire Tempora de l’université Rennes 2. Il est spécialiste de la guerre d’Indochine, d’histoire du renseignement et de la guerre froide en Asie. Il a notamment publié  La Bombe atomique. De Hiroshima à Trump (Passés composés, 2021), rééditée le 24 août 2022 dans une version augmentée sous le titre La Menace nucléaire, avec deux chapitres supplémentaires consacrés à la guerre en Ukraine.
Dominique Mongin est historien, enseignant à l’Inalco et à l’ENS-Ulm. Il est spécialiste de l’histoire des relations internationales contemporaines.
Il a notamment publié :
Générique de l’émission : Origami de Rone
L’équipe

source

Catégorisé: