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« Notre maison brûle et nous regardons ailleurs », disait Jacques Chirac. La France brûle et le nouveau ministre de la Transition écologique et de la Cohésion des territoires Christophe Béchu est aux abonnés absents. Le silence de ce transfuge LR passé chez Horizons, fidèle d’Édouard Philippe et maire d’Angers jusqu’à sa nomination au gouvernement, est d’autant plus assourdissant que son propre département (Maine-et-Loire) est en proie aux flammes, quand plus de 20 000 hectares de forêt ont été dévorés par les incendies en une semaine en Gironde.
Devant les caméras, Gérald Darmanin et Emmanuel Macron. Tous deux ont fait le déplacement en Gironde, le premier le 12 juillet, le second une semaine plus tard, le 20 juillet. Christophe Béchu, lui, s’est contenté de quelques tweets rappelant les bons gestes à observer face aux risques d’incendies. Sa première intervention médiatique n’a eu lieu que le jeudi 21 juillet, sur RTL.


Il est plus que jamais nécessaire d’appliquer les règles de prudence. ▪️Éviter de se rendre dans les zones à risques,
▪️Jeter les mégôts dans des cendriers,
▪️Ne pas faire de barbecue hors de chez soi,
▪️Débroussailler son jardin
?9 feux sur 10 sont d’origine humaine !
Le ministre déroule, tranquille : « Je ne crois pas à la précipitation ou à l’agitation, je crois à la concertation, déclare-t-il pour justifier son silence. Le ministère de la Transition écologique est celui de la prévention, pas celui qui éteint les incendies quand ils ont commencé. Ça, c’est le travail des sapeurs pompiers [et] ce n’est pas la présence du ministre à côté des sapeurs-pompiers qui modifie le drame qu’on est en train de vivre. »
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« Que le Monsieur environnement du gouvernement soit silencieux en pleine canicule et en plein feu de forêt, c’est pas banal quand même », lui objecte le journaliste. « Je ne suis pas d’accord avec ça », répond Christophe Béchu, qui persiste : « D’abord parce que j’ai été nommé il y a quinze jours et ensuite parce que je n’ai absolument pas la prétention de penser que c’est une personne qui est capable ou de provoquer une prise de conscience ou de changer la politique. » Drôle de défense.
« Ce quinquennat sera écologique ou ne sera pas ! », promettait pourtant Emmanuel Macron durant la campagne présidentielle. Avec, pour ce faire, un triumvirat composé d’un « super-Premier ministre » (en la personne d’Élisabeth Borne) secondé par deux ministres dédiés, l’un à la Transition énergétique (Agnès Pannier-Runacher), l’autre à la Transition écologique.
Lorsqu’ils ont eu vent de la promotion à venir à ce dernier poste du lieutenant d’Edouard Philippe – il est nommé le 4 juillet en remplacement d’Amélie de Montchalin –, nombre d’observateurs de la vie politique ont été surpris : Christophe Béchu n’a jamais été considéré comme un fervent défenseur de l’écologie. Et ses adversaires politiques de tacler aussitôt – Sandrine Rousseau en tête, publiant sur Twitter n’avoir « jamais croisé » le nouveau ministre « sur la moindre lutte écologiste ».


Une chose est déjà certaine : jamais croisé @ChristopheBechu sur la moindre lutte écologiste.
Décrit comme « un technosolutionniste, cette vision de la science qui va nous sauver », cinglait dans Le Monde une élue Europe Écologie-Les Verts au conseil municipal d’Angers, le nouveau ministre, âgé de 48 ans, a soutenu dans sa ville le projet dit de « territoire intelligent », visant numériser au maximum les services d’arrosage, de stationnement ou encore d’éclairage au sein de la ville. En tout, un budget de 168 millions d’euros, dépensé sur douze ans. De quoi faire dire à Béchu, chantre des mobilités douces – il a été nommé en 2018 par Emmanuel Macron président de l’Agence de Financement des Infrastructures de Transports de France – que sa cité angevine est « la smart city [ville intelligente et connectée] la plus aboutie en France ».
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Mais quand il s’agit de néonicotinoïdes, les positions de cet ancien LR font tiquer certains. Sur les réseaux sociaux, les internautes ont notamment pointé du doigt sa mollesse lorsqu’il s’est agi de légiférer sur ces insecticides tueurs d’abeilles. Quant au développement de l’éolien, l’édile ne cachait pas son scepticisme auprès de Ouest-France en 2019 : « Je ne suis pas un grand fan de l’éolien, reconnaissait-il alors. Il y a le coût du démantèlement, l’impact visuel… »
« On s’en fout des bicyclettes gratuites à Angers. Il fallait faire plaisir à Édouard [Philippe] on a fait monter Christophe ! », raille un sénateur LR auprès de Libération. Car le ministre Béchu, qui a quitté Les Républicains en 2017, est avant tout le numéro 2 d’Horizons, le parti de l’ancien Premier ministre. Au point que le membre du gouvernement ferait office de simple « quota » dans la composition de l’exécutif ?
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« Si Emmanuel Macron avait vraiment voulu un quota, il aurait simplement donné à Béchu le ministère de la Ville, en plus de la Cohésion des territoires », défend un militant d’Horizons et assistant parlementaire sous la précédente législature auprès de Marianne, tout en concédant l’importance que revêt cette nomination pour son parti : « Permettre à quelqu’un comme Béchu de se former dans un ministère, c’est quand même permettre de former le numéro 2 d’Horizons à ce type de fonctions… Je suis vraiment convaincu que Macron a été un peu “contraint” par Philippe de le prendre. Sachant que ce dernier est en capacité de négocier car, on l’a vu, à l’Assemblée, les votes peuvent se faire à quelques voix près. »
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Pourtant, alors que son maroquin se situait à la cinquième place dans l’ordre protocolaire lorsqu’il était aux mains d’Amélie de Montchalin, il a dégringolé au dixième rang. Plus étrange encore, Christophe Béchu se trouve entouré de cinq ministres délégués et de secrétaires d’État, au poids politique non négligeable. Clément Beaune aux Transports, Olivier Klein à la Ville et au Logement et Caroline Cayeux aux Collectivités territoriales ; Bérangère Couillard à l’Écologie et Dominique Faure à la Ruralité. Une grosse équipe en somme, alors qu’Amélie de Montchalin ne comptait que Christophe Béchu auprès d’elle et qu’Agnès Pannier-Runacher est seule aux manettes de la Transition énergétique.
« C’est un très bon politique, ça m’étonnerait que ce soit fait pour l’empêcher de dire n’importe quoi… », objecte le militant d’Horizons, qui cite en exemple son parcours d’élu local fulgurant « plus jeune président de département à 29 ans, sénateur puis maire d’Angers ».
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Pour l’instant, si Béchu assure sur RTL que « la trajectoire sur les cinq ans qui viennent sera présentée à la rentrée » 2022, le plan de route est surtout entre les mains de la Première ministre. Laquelle s’est entretenu mercredi 20 juillet avec les présidents des conseils régionaux de l’Hexagone et d’Outre-mer, afin « d’aboutir à un programme de travail commun entre le gouvernement et les régions, structuré autour des priorités suivantes : le plein-emploi, la transition écologique, les mobilités, le développement économique et la réindustrialisation », précise un communiqué de presse de Matignon. Réunion où, selon leurs agendas respectifs, ni Christophe Béchu*, ni Agnès Pannier-Runacher n’étaient conviés.
Après la publication de notre article, le ministère de la Transition écologique et de la Cohésion des territoires nous a indiqué que Christophe Béchu était bel et bien présent à la réunion avec les présidents de conseils régionaux, mais que sa participation n’avait pas été inscrite à l’agenda officiel.
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