C’est le premier film pakistanais à figurer parmi les sélectionnés du Festival de Cannes. Le cinéaste de 31 ans puise dans son propre vécu pour pointer très subtilement du doigt le système patriarcal pakistanais. Saim Sadiq signe l’un des grands films de cette année selon les critiques du Masque.
▶︎ Un film en partenariat avec France Inter.
Premier film du Pakistanais Saim Sadiq avec Haider incarné par Ali Junejo vit à Lahore avec son épouse, dans la maison familiale où tout le monde cohabite sous l’autorité d’un patriarche qui ordonne à Haider non seulement de devenir père, mais aussi de trouver du boulot et puis de savoir égorger une chèvre, d’être un homme, un vrai. Et le boulot Haider, le déniche, mais dans un cabaret où il tombe vite amoureux de la magnétique danseuse Biba qui est jouée par Alina Khan or Biba est une femme trance. Ce film, qui ose briser un tabou dans une société ultra patriarcale, a reçu à Cannes le prix du jury “Un certain regard” ainsi que la Queer Palm. Ajoutons que la réalisation est d’une délicatesse et en même temps d’une puissance rare. Titre hautement symbolique et métaphorique puisque “Joyland”, c’est aussi le nom du parc d’attraction qui se trouve à Lahore.
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Pour la critique de Sud-Ouest, c’est un très beau film, magnifiquement bien mené de bout en bout, et qui retranscrit extrêmement bien les contradictions de la société pakistanaise : “Un film qui est à la fois terrible, voluptueux, élégant et délicat qui montre très bien comment le patriarcat pèse sur les femmes et sur les hommes, surtout quand on est comme Haider, doux, gentil et qui ne veut pas faire peser sa propre autorité sur les autres. C’est un film étonnant, qui aime énormément ses personnages parce que tous sont attachants. Même le patriarche n’est pas caricatural. Jamais ce n’est caricatural, même la belle sœur qui est un peu conservatrice, il en fait tout autre chose.
Il y a une construction extrêmement intelligente et bienveillante qui montre aussi les paradoxes de la société pakistanaise parce que les femmes sont écrasées, emprisonnées par le patriarcat, mais il faut voir comment elles parlent de sexe entre elles. Biba est à la tête d’une troupe de danseurs qu’elle renvoie à leur vulgarité et à leur obsession de ce qu’ils ont entre les jambes.
Là ou le film est magnifique, c’est qu’il se termine sans révéler la fin par donner la parole à la belle fille, qui est pourtant la plus conservatrice et qui, à un moment donné, prend la parole, explose et cloue le bec de son mari, de tout le monde. Mais pour en arriver là, il a fallu des drames, une construction d’une intelligence incroyable. C’est vraiment un très beau film doué d’une réalisation d’une souplesse, délicate, étincelante et assez voluptueuse”.
Après avoir rappelé qu’il s’agit du tout premier film pakistanais jamais montré à Cannes, le critique de la revue Positif partage lui aussi son admiration pour la qualité qu’offre ce film : “c’est le contraire du film à thèse, car ça aurait pu être un film très appuyé, très démonstratif. Y compris, par exemple, le personnage de la femme de cet homme qui tombe amoureux de cette femme transgenre et qui, au fond, a de l’amour pour lui alors qu’elle sent qu’il lui échappe. Le personnage n’est pas du tout maltraité, au contraire.
C’est un film très généreux et très délicat sans compter le culot de réalisé un film comme cela au Pakistan”.
C’est un des grands films de l’année d’après le critique de 7e obsession qui rappelle en passage que le film fait partie des 15 films préséléctionnés aux Oscars cette année aux côtés de “Saint Omer” (la liste est tombée il y a quelques jours pour représenter le Pakistan), et que c’est grâce à la France, puisque le Pakistan avait retiré son visa d’exploitation du film. Il salue donc au passage Condor, le distributeur pour cet acte militant. C’est un film qui l’a profondément ému, en particulier par la place et le rôle si naturel attribué à la femme du personnage principal : “C’est un film que j’ai vu à Cannes et qui m’a hanté. Je l’ai revu plusieurs fois. C’est un film absolument magnifique. La femme, l’épouse, n’est pas sacrifiée. Que cette danseuse soit transsexuelle, le film n’en fait même pas un sujet, puisqu’il clôt tout de suite cette espèce de tentation classique du quiproquo. C’est très clair dès le départ.
La mise en scène touche au sublime. Quand sa femme lui demande de danser, il se met à danser un peu hors champ. Et plutôt que de faire un champ contre champ, d’alterner des plans sur l’épouse et des plans sur le mari dont on sait qu’il danse mal, on reste uniquement sur l’épouse et sur le regard de cette femme attendrie, pétrie d’amour pour un homme qui est en train de lui échapper. Rien que pour ce plan-là, et il y en a 1 milliard d’autres dans le film, c’est un des grands films de l’année. Il y a même des inventés, on dirait parfois même du Fassbinder de la première époque, puisque ça utilise les néons, l’odeur de l’extérieur, et le glauque devient sublime !”
Le personnage de l’épouse l’a particulièrement bouleversé : “Ce qui me plait vraiment le plus dans cette galerie de personnages, c’est vraiment l’épouse du héros, qui est le personnage le plus touchant. Cette femme qui a épousé ce type parce qu’on lui avait dit qu’elle pourrait travailler”.
🎧  Écoutez l’ensemble des critiques échangées à propos de ce film sur le plateau du Masque et la Plume :
“Joyland” de Saim Sadiq
6 min
► Toutes les autres critiques de films du Masque et la Plume sont à retrouver ici .
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