Mobilité
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Il fête sa centième édition après trois ans d’absence, le Salon de l’Auto s’ouvre au grand public ce samedi à Brussels Expo, au Heysel à Bruxelles.
L’une des vedettes de ce salon sera bien sûr la voiture électrique. L’objectif européen est d’atteindre 100% pour tous les véhicules neufs en 2035 et la Belgique veut mettre fin à la voiture de société thermique en 2026, donc d’ici déjà trois ans.
Alors, quels sont les freins à la généralisation de la voiture que l’on branche à une prise de courant ? Que faut-il pour que le Belge passe à l’électrique ? Peut-on espérer voir les prix diminuer à court, moyen ou long terme ? Les bornes de recharge sont-elles suffisantes ?
Olivier Duquesne est journaliste au Moniteur automobile et spécialiste des véhicules électriques. Il nous aide à répondre à une série de questions.
Selon une étude de la banque BNP Paribas Fortis, 35% des Belges déclarent qu’ils ne passeront jamais à la voiture électrique. Pourquoi une telle réticence ?
Pour l’instant, c’est encore très cher, confirme notre expert. “Par rapport à une voiture similaire qu’on peut trouver à 25.000-30.000 € en thermique, il faut compter 40.000-50.000 € en électrique pour le même gabarit, mais avec une flexibilité un peu différente puisqu’il faut recharger la voiture électrique.
L’autonomie est parfois limitée à 200 ou 300 kilomètres sur autoroute. Ce sont donc des freins. Et il y a aussi des personnes qui ne savent pas installer de borne à domicile parce que c’est impossible de mettre la borne, on ne peut pas stationner la voiture et il n’y a pas encore l’infrastructure suffisante sur la voie publique pour pouvoir compenser l’absence de borne à la maison“.
Que faut-il penser des voitures électriques “premiers prix” ?
Le premier prix, c’est 20.000 €, mais c’est une voiture électrique qui aura une autonomie relativement faible, surtout si on fait de l’autoroute, c’est-à-dire 150-200 kilomètres grand maximum, avec une charge lente en plus, donc on ne pourra pas la recharger en 20 minutes. Il faudra attendre si on doit faire de l’autoroute. Ensuite, on peut déjà trouver des modèles à 30.000-35.000 €, mais plutôt des modèles d’origine chinoise, qui sont de bons modèles aussi, mais il y a aussi l’aspect géopolitique. Par contre, si on va chercher dans des marques occidentales, coréennes ou japonaises, on est déjà à plus de 40.000 €.”
Il faut donc compter 40.000 € pour une voiture confortable et 100% électrique, parce que même avec les voitures les chinoises au prix d’appel à 35.000 €, il faut rajouter deux ou trois options et on arrive à 40.000 €.
Et combien coûte l’installation d’une borne ? “Sans vouloir avoir la prime, c’est 600 €, mais si on veut bénéficier de la prime qui existe encore, il faut une borne intelligente, il faut parfois adapter son réseau électrique et il faut compter 2000-3000 € minimum.
Ce sont elles qui font bondir les chiffres de vente, pas celles des particuliers. La vente de véhicules neufs hybrides ou électriques a quadruplé en quatre ans.Si on regarde les immatriculations neuves en 2022, 10% des voitures étaient électriques. Mais ce sont essentiellement des voitures de société puisque le marché du neuf en Belgique en 2022, c’était 70% de voitures de société. Ce sont donc vraiment les indépendants et les entreprises qui, poussés par la fiscalité, passent à l’électrification, à l’hybride rechargeable et maintenant l’électrique, puisque l’hybride rechargeable va être défavorisé à partir du 1er juillet 2023.
Sans ce système de voitures de société, de voitures salaires, comme on les appelle en Belgique, il n’y aurait pas ou peu de développement du véhicule électrique dans notre pays. “On serait à 2 ou 3% grand maximum, confirme Olivier Duquesne, comme dans les pays de l’Est par exemple.
Il y a beaucoup de voitures électriques en Norvège, aux Pays-Bas et en France parce qu’il y a des primes pour les particuliers. Et donc, les privés sont incités à acheter des voitures électriques parce qu’en Norvège, c’est le système inverse, on défiscalise les voitures électriques, donc on favorise l’achat de voitures électriques qui sont moins taxées. On leur donne aussi des accès privilégiés aux centres-villes. Aux Pays-Bas et en France, on a des primes qui peuvent être de plusieurs milliers d’euros. En Belgique, on n’a rien.
En tant que particulier, à l’exception du coup de pouce pour la borne, il n’y a donc pas de primes à l’achat d’un véhicule électrique. En Wallonie et à Bruxelles, les véhicules électriques sont taxés, contrairement à la Flandre.
Le prix des batteries, pièces maîtresses de ces véhicules, est encore assez élevé. “Si on n’a pas de batterie dans une voiture électrique ou une petite batterie, on ne va vraiment pas très loin. Donc, plus la batterie est grande, plus le prix de la voiture sera forcément élevé. Et il y a aussi le nombre de pièces. Les constructeurs commencent à de mieux en mieux connaître la motorisation électrique, donc ils commencent à optimiser la fabrication de ces véhicules. Ils arrivent à diminuer le nombre de pièces et à être un peu plus intelligents sur l’utilisation des métaux rares, par exemple.
Le prix peut baisser, mais en parallèle, le prix des thermiques augmente aussi puisque les normes sont de plus en plus strictes. On va alors plus arriver vers un alignement, parce que les thermiques vont augmenter et les électriques vont baisser un peu. On ne doit pas s’imaginer que, dans trois ans, les prix des voitures électriques arriveront au niveau des voitures thermiques. C’est plutôt une égalisation parce que l’une monte et l’autre baisse un peu.
S’acheter une voiture coûtera donc plus cher dans quelques années, quoi qu’il arrive.
Avec la crise de l’énergie, les prix de l’électricité ont fortement augmenté. Est-ce que ça reste plus intéressant tout de même de faire le “ plein ” électrique que de remplir son réservoir avec du diesel ou de l’essence ?
Ça dépend où vous faites le plein, relativise Olivier Duquesne. Quand vous faites le plein dans une station-service, ce n’est pas compliqué, vous avez cinq ou six stations, vous regardez celle qui est la moins chère et où le plein sera le moins cher.
Pour les voitures électriques, le problème est que les prix sont très variables entre les bornes ou parfois en fonction de la consommation de la voiture électrique, en comparaison avec un modèle thermique. Parfois, le coût kilomètres de la voiture électrique sur ces bornes coûte plus cher qu’une voiture diesel.
Un plein rapide sur autoroute coûte plus cher en électrique qu’en thermique ? “Ça peut coûter plus cher. Ça dépend de la consommation de la voiture électrique. Par contre, si on fait le plein à la maison et qu’en plus, on le fait en journée grâce à ses panneaux solaires, on a de l’électricité ‘gratuite’, (parce qu’il y a l’investissement et l’amortissement de l’infrastructure des panneaux), donc la voiture ne coûte presque rien, du moins à l’usage.
Donc, ce coût d’usage d’électricité dépend très fort de comment on fait son plein d’électricité, de comment on recharge sa voiture. Si on la recharge souvent aux frais du patron au travail ou via l’énergie solaire, le coût kilomètres est évidemment très bas. Si on est dépendant des infrastructures sur la voie publique, on a un coût qui est un peu inférieur à celui du pétrole avec les bornes lentes. Mais si on doit le faire sur des bornes rapides où vous êtes à 0,84 € le kilowattheure, le plein coûte vite très cher.”
Six marques chinoises seront présentes au Salon de l’auto à Bruxelles.
Est-ce que, dans quelques années, ces voitures chinoises vont envahir le marché européen ? “On a connu le même phénomène avec les coréennes, un peu avant les japonaises. Par exemple, les voitures japonaises sont arrivées à un moment où la première crise pétrolière faisait qu’elles consommaient un peu moins et elles étaient donc devenues plus intéressantes que les modèles occidentaux. Effectivement, la Chine a fait le pari de la voiture électrique, notamment pour la fabrication des batteries.
Il faut savoir que les premières tentatives chinoises ont été des désastres parce que leurs voitures n’étaient pas du tout adaptées au marché occidental, et au marché européen en particulier. Et maintenant, on arrive avec des produits qui sont bien conçus, bien finis.
Il faut savoir aussi que les Chinois ont investi dans des marques occidentales, dans des marques européennes. Par exemple, Volvo appartient à Geely, qui est une grosse multinationale chinoise spécialisée dans l’automobile. Il y a donc vraiment une impulsion chinoise sur le marché automobile mondial parce que les Chinois ont prévu de faire des voitures électriques, parce qu’eux aussi veulent imposer la voiture électrique sur leur propre marché. Et donc, tout ça fait que les Occidentaux ont évidemment un peu de retard. C’est pour ça qu’on essaie de fabriquer des giga factories pour faire des usines à batteries en Europe et que les constructeurs européens essaient aussi de relancer des modèles électriques.
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