Lorsqu’on parle de bocage, généralement, la référence à la Normandie ou à la Vendée suit, même si cette structure paysagère se retrouve également dans d’autres régions. L’intérêt écologique du bocage ne fait aucun doute, et d’ailleurs son histoire va de pair avec l’évolution des pratiques agricoles : en effet, l’agriculture intensive l’a bien écorné avant que des pratiques plus respectueuses de l’environnement le préservent. Au niveau domestique, le jardin bocager dévoile aussi ses atouts.
Qu'est-ce que le bocage ?
Si l’on se réfère au Dictionnaire historique de la langue française dirigé par l’irremplaçable linguiste Alain Rey, l’entrée bocage indique qu’il s’agit d’un nom masculin d’abord écrit “boscage (1138) en anglo-normand, graphie sortie d’usage après 1611″, évoluant vers bocage à partir de 1538, qui “est le dérivé dialectal de bosc, forme qui a dû précéder bos (v.1155), lui-même fréquent en ancien français (-> bois).”
“Le sens propre de « lieu fourré, boisé » est sorti de l’usage courant et survit dans le style poétique (depuis 1704, Trévoux). Par métonymie, bocage se dit d’un type de paysage caractéristique de l’ouest de la France, formé de prés clos par des levées de terre plantées d’arbres (1732, comme nom d’un “pays” de Basse-Normandie, dans le domaine de Lisieux). Ce type de paysage remonterait au haut moyen âge, d’après des monnaies ou les termes d’un cartulaire de Redon au IXè siècle. Vers 1850, le bocage marque son extension maximale ; depuis, les progrès techniques et les remembrements ont abouti à la disparition d’assez larges secteurs.”
Le mot est lâché : remembrement.
En effet, après la seconde guerre mondiale, la mécanisation de l’agriculture renvoie aux écuries les chevaux de trait pour laisser la place aux tracteurs. C’est le début de l’agriculture intensive qui va nécessiter des parcelles de plus en plus grandes pour des engins de plus en plus imposants, des produits chimiques de plus en plus toxiques, un endettement des exploitants agricoles de plus en plus écrasant, une productivité de plus en plus forte. Pour ce faire, l’arrachage des haies devient la solution prônée par les politiques d’aménagement foncier qui reposent sur une réorganisation des terres : les paysans regroupent leurs petites parcelles pour obtenir de grandes surfaces planes, sans obstacles, qui optimisent le travail.
A partir de la loi d’orientation agricole de 1960, pendant plus de 30 ans, le remembrement va aller bon train, malgré les oppositions qui n’ont pas empêché les répressions, parfois violentes, et la destruction de paysages.
En outre, l’épidémie de graphiose qui a décimé les ormes au milieu des années 1970 a contribué à la destruction naturelle de haies constituées de cette essence.
Aujourd’hui encore, des haies disparaissent, même si le rythme est moins soutenu, à l’initiative d’archaïques défenseurs de l’agriculture intensive, d’un côté. De l’autre côté, des opérations de restauration de bocage sont entreprises par des associations de défense de l’environnement mais également par des Conseils Départementaux. Des aides publiques à la replantation et à l’entretien de haies permettent de restaurer le bocage. L’opposition entre agriculture conventionnelle et agriculture paysanne, souvent bio, se manifeste clairement. Espérons que la seconde l’emporte…
Autrefois, les haies défensives délimitaient les clôtures des parcs où les animaux paissaient, les empêchant de s’échapper. Par ailleurs, comme toutes les haies, celles du bocage permettaient de protéger les cultures du vent, ce qui demeure le cas aujourd’hui. En servant de brise-vent, les haies limitent les dégâts causés par les intempéries. Elles diminuent également l’évapotranspiration, ce qui est précieux à l’heure du réchauffement climatique.
Les haies abritent de nombreuses espèces de la faune locale, elles jouent le rôle de véritables corridors biologiques dans lesquels se trouve un réservoir de biodiversité précieux dans la lutte biologique dans les champs comme au potager.
La haie produit souvent des baies qui attirent les oiseaux, elle favorise le développement de champignons à ses pieds, et permet au gibier de se cacher.
intérêt du bocage
Comme en agroforesterie, la haie permet aussi, lors de son entretien – indispensable – de fournir du bois pour se chauffer. Elle est aussi une source formidable de matière première pour créer des plessages , des bordures en bois tressé et autres créations en osier.
La haie allant de pair avec les fossés, ceux-ci permettent de drainer le sol durant les périodes pluvieuses, pour redistribuer l’eau lorsque le temps sec arrive. Rien de plus logique !
La haie utile pour la biodiversité, la haie de fruits et baies comestibles, la haie mellifère, la haie fleurie, elles trouvent toutes leur utilité au jardin pour les mêmes raisons que celles du bocage.
Classé parmi les beaux livres, La Maubrairie, jardins de bocage* de Stéphane Marie, animateur de l’émission Silence, ça pousse ! sur France 5, invite à découvrir son jardin au cœur du bocage du Cotentin. La relation entre les jardins et le bocage, paysage agraire identitaire et composant essentiel du réseau écologique, y devient évidente, en partant d’une traversée du bocage du Cotentin, suivie d’une découverte des quatre jardins de la propriété… Une promenade poétique coécrite avec Dany Sautot, spécialiste des jardins et de l’histoire des arts décoratifs, et agrémentée de superbes photographies de Pascaline Noack.
* Tana Editions –- 216 pages – 6 octobre 2022 – 32 €

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